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Photo du rédacteurLéon LB

POÉSIE DU TANGO: TYPOLOGIE ET EXÉGÈSE Partie 1

Dernière mise à jour : 22 nov. 2023




Cet exposé est un extrait de l’article que j’ai publié dans le site web Academia.edu, sous le titre (espagnol) “Poesía de las letras del tango: ¿exégesis o no exégesis?”.


Le plan est le suivant :

- Les paroles du tango sont-elles de la poésie ? sont-elles poétiques ?

- Une typologie pour l’analyse des paroles du tango

- Illustrations de la classification : 33 chansons, 98 extraits


Dans cet article, pour des raisons de volume, une première partie des illustrations est présentée : les citations de cinq paroliers. Celles des sept autres seront présentées dans un prochain article.


Les paroles du tango sont-elles de la poésie ? sont-elles poétiques ?


On admet très généralement que les paroles d’un nombre important de tangos sont remarquables par leur force littéraire, les descriptions, les récits et les sentiments qu’elles expriment, aussi parce qu’elles sont "poétiques". On parle donc fréquemment de la poésie des paroles de tango, écrites par un nombre relativement faible (si l’on considère, pour un auteur, le niveau littéraire combiné avec le caractère prolifique) d’auteurs ou de paroliers, et notamment (ordre de date de naissance) :


- José González Castillo (1885 - 1937)

- Pascual Contursi (1888 - 1932)

- Celedonio Flores (1896 - 1947)

- Alfredo Le Pera (1900 - 1935)

- Enrique Cadícamo (1900 - 1999)

- Enrique Santos Discépolo (1901 - 1951)

- Cátulo Castillo (1906 - 1975)

- Homero Manzi (1907 - 1951)

- José María Contursi (1911 - 1972)

- Homero Expósito (1918 - 1987)

- Horacio Ferrer (1933 - 2014)

- Eladia Blázquez (1931 - 2005)


Pour éviter des confusions ou des malentendus, je m’appuie sur un extrait du Diccionario de la Real Academia Española (RAE), que je traduis ici :


"POÉSIE

1. f. Manifestation de la beauté ou du sentiment esthétique au moyen de la parole, en vers ou en prose.

…….

6. f. Idealité, lyrisme, qualité qui suscite un sentiment profond de beauté, manifeste ou non, au moyen du langage.

7. ……."


"POÉTIQUE

1. ……….

2. adj. Qui manifeste ou exprime fortement les qualités propres de la poésie, spécialement celles de la poésie lyrique.

3. adj. Qui participe des qualités de l’idéalité, spiritualité ou beauté propres de la poésie.

4. ……."


Concrètement, je donne la primauté à l’adjectif "poétique" sur le substantif "poésie", aux émotions sentimentales, esthétiques, philosophiques, etc. sur la métrique et les rimes.


En d’autres termes, je dirais que le tango-chanson n’est pas de la poésie chantée, mais c’est du chant poétique, même lorsqu’il ne respecte pas les règles formelles de la poésie classique. Il me semble donc légitime de parler de poésie et de poètes du tango.


Pour plus de précision, je cite un paragraphe de mon livre "Poésie de lune et tango" (voir la section livres de ce site) :


" Les paroles de tango ne sont pas de la poésie, mais contiennent de la poésie


Précisons que les chansons du genre - ou du moins les plus grandes - ne sont pas des poésies musicales ni des musiques auxquelles on ajoute des paroles, mais plutôt le résultat d’une collaboration étroite entre le compositeur et le parolier, quel que soit celui qui a lancé le processus. Ainsi, dans certaines circonstances, ils parviennent à dépasser la méthode de création et à atteindre un niveau "d’anthologie".

Quoi qu’il en soit, le rythme commande, les paroles fusionnent avec lui, ce qui permet ensuite aux chanteurs le phrasé ("fraseo") si caractéristique du tango.

Pour cette raison, les paroles de tango ne sont pas purement des poésies, mais de fait elles portent les figures de style de la poésie (anaphores, métaphores, ellipses, allégories, oxymores, etc.) : on en trouve de nombreux exemples dans les exégèses de la section B.

On n’analyse pas non plus la métrique, extrêmement variable entre les chansons et même à l’intérieur d’une même chanson, ni les rimes, aussi très variables, et cela pour les raisons déjà présentées : les vers doivent avant tout cadrer avec la musique et sa complexité.

Citons à ce propos simplement Homero Expósito : "Celui qui naît avec la cadence n’a pas besoin de rimes". "


Cet aphorisme d'Expósito parle de rimes, mais évoque peut-être implicitement la métrique, dont la grande variabilité est due principalement au rythme de la musique.


Pour préciser cette question, j’ajoute un avis de l’académicien argentin Oscar Conde dans son article "La poética del tango como representación social" (Academia.edu), dans lequel il cite à son tour Maria Susana Azzi.

" Mais la musique accompagnée de paroles -surtout s'il s'agit de paroles de bon niveau- a multiplié ses chances. Il existe même de nombreux tangos musicalement très pauvres, qui ont perduré par leurs paroles, tout comme il y a, bien sûr, des cas inverses. Les paroles de tango reflètent un ensemble de sous-entendus ou de complicités qui déterminent une sorte de caractère social.

Selon Maria Susana Azzi, "Les paroles octroient à ceux qui les écoutent et les connaissent par cœur une tradition sur qui ils sont, ce que signifient le quartier, la ville et le passé, ce qu'ils peuvent attendre de la vie et combien de frustrations les attendent au coin de la rue. La boîte aux lettres, l'épicerie, le lampion et la lune ne sont pas seulement une partie d’une description géographique urbaine, ils portent une signification émotionnelle qui s'avère transcendante pour un jeune homme de quartier : c'est la force vitale du passé et de relations interpersonnelles qui lui donnent une identité personnelle et culturelle."


Toutefois, pour relativiser les discussions sur la poésie et le poétique, je conclus cette introduction par une sentence de Federico Garcia Lorca : "Ni moi ni aucun poète ne savons ce qu’est la poésie" ("Ni yo ni ningún poeta sabemos lo que es la poesía").


Une typologie pour l'analyse des paroles du tango


Mon travail intense depuis 2015 pour traduire les paroles en français, avec la volonté originale de respecter le rythme, m’a conduit à des analyses approfondies de nombreux vers, et m’a conduit à écrire des exégèses dans le livre évoqué.

Mais au-delà de mon expérience personnelle, je suis convaincu que les paroles des meilleurs tangos doivent être analysées, commentées et partagées avec les lecteurs et/ou auditeurs non spécialistes ; peut-être aussi avec quelques experts ouverts, comme une proposition de lecture, où ils choisiront ce qui leur semble pertinent et peut-être singulier, et passeront rapidement sur le reste.


Des exégèses, pourquoi ?


Pour traduire le Lunfardo, souligner la poésie et/ou la force des vers en langue de tous les jours, le rythme, la musique, partager l’émotion, expliquer les points obscurs ou les références littéraires, mettre en évidence et analyser les figures de style, notamment les plus remarquables, commenter certaines expressions étranges, etc.

Mais évidemment, tous les vers ne méritent pas des analyses profondes et subtiles, ou plutôt certains le méritent plus que d’autres !

Cherchant des critères pour choisir les vers qui ont le plus besoin d’exégèse, je suis arrivé progressivement (avec des allées et retours entre de nombreuses œuvres) à dégager deux axes de classification qui se combinent : l’intensité évocatrice et d’émotion, d’une part, la difficulté de compréhension, d’autre part.


Ce dernier critère -le plus simple- sert à distinguer entre une expression simple dans son vocabulaire et sa syntaxe, comme par exemple " Je n'en peux plus qu'il n'y ait rien à manger / Ni de t'entendre dire autant de conneries. /" ("No puedo más pasarla sin comida ni oírte así, decir tanta pavada." - "Que vachaché" - Discépolo) et, à l’autre extrémité, une autre beaucoup plus allusive et opaque comme "Avec le vin et le pain du triste tango qu'Arolas aurait tu près de la boue fatiguée de son front [ Traduction sous réserve, justement à cause de l'opacité du vers.]" ("Con vino y pan del tango tristísimo que Arolas callara junto al barro cansado de su frente" - "La última grela" - Horacio Ferrer).


En revanche, l’intensité évocatrice et d’émotion est un critère plus subtil car s'y mélangent deux idées : le degré rhétorique (que j’ai introduit dans mon exposé de décembre 2021 au congrès de l’Académie Nationale du Tango), qui qualifie le niveau d’utilisation de figures de style, d’une part, la force de la transmission d’images, d’émotions, d’atmosphères, etc., d’autre part.

Le degré rhétorique indique ce que l’on pourrait appeler la distance rhétorique entre l’idée à communiquer et la forme littéraire à utiliser : du langage direct (la prose) aux allégories, paraboles et /ou expressions étranges ou obscures, en passant par les métaphores, anaphores, anastrophes, etc.

La force de transmission d'images, d'émotions, d'atmosphères, peut être considérée indépendamment du degré rhétorique, comme une force poétique amplifiée par la musique. Exemples :


- Dans "Je l'ai vue dans sa jeunesse, qui brodait des fantaisies avec ses rêves de grandeur et ses bringues au champagne." ("Yo la he visto cuando moza ir tejiendo fantasías con sus sueños de alto vuelo y sus noches de champán" - "Vieja recova"), Discépolo évoque une époque, un lieu, une ambiance un personnage, sans figures de style.

- Dans "Les deux en cuite, et dans la tristesse mièvre, celle que me donne l'ivresse, je te demande, mon amour, de me chanter comme avant, doucement, tout doucement, ta chanson encore une fois…" (" Los dos en curda y en la pena sensiblera que me da la borrachera yo te pido, cariñito, que me cantes como antes, despacito, despacito, tu canción una vez más..." - "Una canción"), Cátulo Castillo nous communique l'émotion de cet homme et son évocation du passé du couple, sans figures de style.


Bien évidemment, cette force poétique peut également se combiner avec des figures de style. Exemples :


- Dans "Carrefour d’un quartier portègne, tes murs sont repeints de lune et soleil. Te pleurent les pluies de l'hiver dans les aquarelles de mon évocation." ("Esquina de barrio porteño te pintan los muros la luna y el sol / Te lloran las lluvias de invierno en las acuarelas de mi evocación" "Esquinas porteñas"), Manzi peint un lieu et transmet une nostalgie avec trois métaphores en quatre vers.

- Dans "Éternelle et vieille jeunesse, qui m'a laissé tout apeuré, comme un oiseau sans lumière.", (Eterna y vieja juventud que me ha dejado acobardado como un pájaro sin luz" (Naranjo en flor), Homero Expósito nous fait entrer dans la douleur et la frustration du protagoniste à l'aide d'un oxymore et d'une métaphore.

Dans un souci de simplicité, je mélange les deux idées dans un seul critère composé : le DEGRÉ POÉTIQUE.


En résumé, il y a donc deux critères pour évaluer la nécessité d'analyse et de commentaire :

- Le Degré Poétique, avec 3 niveaux croissants : D1, D2, D3,

- La difficulté de compréhension, avec 3 niveauxcroissants : C1, C2, C3


Ils se combinent en 9 niveaux de besoin d'exégèse : D1C1, D1C2, D1C3, D2C1, …, D3C1, … D3C3.


Ainsi, si l'analyse et le commentaire ne s'imposent pas au niveau D1C1, ils sont, à mon avis nécessaires au niveau D3C3.


Dans ce qui suit, j'illustre cette classification avec 98 extraits (dans l'article complet : 150) de 33 chansons (dans l'article complet : 53) des poètes du tango mentionnés, en indiquant leur classification, et en suggérant ce qui, à mon avis, mérite d'être analysé et commenté sur l'aspect littéraire.


Nota bene - Je n'oublie nullement l'importance capitale de la musique associée, mais il serait trop compliqué de développer ici cet aspect essentiel. En revanche, j'indique pour chaque tango cité une interprétation pour donner une idée de la musique à ceux qui ne les connaissent pas bien (mis à part Carlos Gardel, je choisis souvent ici les interprétations de Roberto Goyeneche, en raison de son talent exceptionnel, mais aussi parce qu'il est l'un des rares à chanter l'intégralité des paroles).



Illustrations de la classification


(Poètes présentés par ordre de date de naissance, œuvres ordonnées chronologiquement. Les traductions des vers sont pour la plupart celles du livre, faites pour respecter le rythme de la musique).

José González Castillo (1885 - 1937)


Organito de la tarde - 1923, musique de Cátulo Castillo (interpret. Carlos Gardel / Guitarras)


  • "Au pas qui traîne d'un pauvre vieux / Peuple de notes tout le quartier, / Dans un concert de verres cassés, / Le limonaire crépusculaire." ("Al paso tardo de un pobre viejo / puebla de notas el arrabal, / con un concierto de vidrios rotos, / el organito crepuscular. /") : puisssance de l'image et de l'atmosphère communiquées en quatre vers, avec l'unique, mais très réussie, métaphore du verre brisé. (D3C1)


  • "Dans les notes de cette musique / Il y a je n'sais quelle vague sensation / Le quartier semble / Tout entier imprégné d'émotion." ("En las notas de esa musiquita / hay no sé que vaga sensación / que el barrio parece / impregnarse todo de emoción. /") : puissance évocatrice d'atmosphère et de sentiments, sans aucune figure de style. (D3C1)


Griseta -1924, musique de Enrique Delfino (interpret. Carlos Gardel / Guitarras)

  • "Rare mélange de Musette et de Mimi / Des caresses de Rodolphe et de Schaunard, / C'était la fleur de Paris / Qu'un rêve romanesque mena dans le faubourg..." ("Mezcla rara de Museta y de Mimí / con caricias de Rodolfo y de Schaunard, / era la flor de París / que un sueño de novela trajo al arrabal...") : souligner et expliquer les références à des personnages de la bohême française. (D2C3)


  • " Mais la froide indigence de ce faubourg / A épuisé l'innocence de sa foi, / Sans rencontrer son Duval, / Son cœur s'est desséché, de même qu'un muguet." ("Mas la fría sordidez del arrabal, / agostando la pureza de su fe, / sin hallar a su Duval, / secó su corazón lo mismo que un muguet…": expliquer l'évocation de Duval, souligner la dure image du quartier, le sens allusif de "l'innocence de sa foi", expliquer le symbole du muguet dans la tradition française, et souligner la triste métaphore correspondante. (D3C3)


Pascual Contursi (1888 - 1932)

Mi noche triste - 1917, musique de Samuel Castriota (interpret. Carlos Gardel / Guitarras)


  • " Femme tu m'as laissé tomber / Dans le meilleur de ma vie, / Me laissant l'âme meurtrie / Et une épine dans le cœur, /" ("Percanta que me amuraste / en lo mejor de mi vida, / dejándome el alma herida / y espina en el corazón, /") : à part la métaphore commune de l'épine dans le cœur, langage simple pour raconter une histoire, sachant que ce tango est considéré comme le premier du genre tango-chanson. (D2C1)


  • "Il n'y a plus dans la piaule / Ces jolies petites fioles / Décorées de p'tits lacets / Tous de la même couleur." ("Ya no hay en el bulín / aquellos lindos frasquitos, / adornados con moñitos / todos de un mismo color. /") : encore plus prosaïque et banale que la précédente, mais elle donne une indication de sensibilité et de délicatesse, peu compatible avec l'hypothèse que le personnage serait un voyou. (D1C1)

Celedonio Flores (1896 - 1947)

Mano a mano - 1923, musique de Carlos Gardel y José Razzano (interpret. Gardel / Guitarras)


  • " Ta présence bienveillante réchauffait ma petite piaule / Tu étais bonne et constante, et je sais que tu m'aimais / Comme tu n'as jamais aimé, comme tu n'aimeras jamais. /" ("Tu presencia de bacana puso calor en mi nido, / fuiste buena, consecuente, y yo sé que me has querido / como no quisiste a nadie, como no podrás querer. /": aucune figure de style dans ces vers, sachant que Celedonio Flores s'enorgueillissait de son style et de son Lunfardo destinés au peuple des faubourgs. On peut souligner l'éloge de la jeune fille et la douloureuse nostalgie du temps passé. (D1C1)


  • " Souviens-toi de cette époque, tu étais une pauvre fille / Tu feintais la pauvreté / dans ta chambre de pension." ("Se dio el juego de remanye cuando vos, pobre percanta, / gambeteabas la pobreza en la casa de pensión; /") : le Lunfardo ici nécessite explication, et la métaphore sur la pauvreté de la fille mérite une interprétation, en même temps que la mention de la "chambre de pension". D2C2


  • "La milonga des rupins et ses folles tentations, / Où triomphent et claudiquent des vanités de danseurs, /" ("La milonga entre magnates con sus locas tentaciones, / donde triunfan y claudican milongueras pretensiones. /") : la force d'un portrait méprisant et venimeux, en deux vers, de ce milieu de riches et de milongueros, dans lequel la femme aimée est entrée... (D1C2)


Alfredo Le Pera (1900 - 1935)

Melodía de arrabal - 1932, musique de Mario Battistella y Alfredo Le Pera (interpret. Gardel / Guitarras)


  • "Quartier argenté par la lune, / Des rumeurs de milongas / C'est toute sa fortune. /" ("Barrio plateado por la luna, / rumores de milonga / es toda su fortuna. /" ) : deux belles métaphores pour transmettre l'atmosphère du quartier pauvre par une image de lumière et la musique. (D2C1)


  • "Barrio, … barrio / toi qui a l'âme craintive d'un moineau sentimental" ("Barrio... barrio / que tenés el alma inquieta / de un gorrión sentimental. :": plainte nostalgique avec la métaphore du moineau qui mérite interprétation. (D2C2)

Arrabal amargo - 1935, musique de Carlos Gardel (interpret. Carlos Gardel / Orq. Terig Tucci)


  • "Tes ombres torturent / Mes heures sans sommeil / Et ta nuit s'enferme / Dans mon pauvre coeur. /" ("Tus sombras torturan / mis horas sin sueño, / tu noche se encierra / en mi corazón /") : langage simple pour communiquer la douleur amoureuse du protagoniste, avec deux figures de style : personnification des ombres (en plus de la personnification du quartier, auquel il s'adresse) ; métaphore de la nuit enfermée dans le cœur. (D2C1)


  • "Maintenant vaincu, / Je traîne mon âme, / Cloué à tes rues / Comme à une croix." ("Y ahora, vencido, / arrastro mi alma, / clavao a tus calles / igual que a una cruz. /") : expressión claire d'une douleur très forte, avec l'allégorie du calvaire de la croix. (D2C1)


Volver - 1935, musique de Carlos Gardel (interpret. Carlos Gardel / Orq. Terig Tucci)


  • "Volver, avec le front fané, / Les neiges du temps argentent mes tempes" /" ("Volver, / con la frente marchita, / las nieves del tiempo / platearon mi sien. /") : superbes métaphores pour faire allusion au temps passé. (D3C1)


  • "Sentir que la vie est un souffle / Que vingt ans ce n'est rien / Que le regard fébrile / Errant dans les ombres / Te cherche et te nomme." ("Sentir, que es un soplo la vida, / que veinte años no es nada, / que febril la mirada / errante en las sombras / te busca y te nombra. /") : avec des paroles et des métaphores simples, il transmet à la fois une réflexion "philosophique" et le chagrín désespéré pour ce qui a été perdu. (D3C1)


Enrique Cadícamo (1900 - 1999)

Vieja recova - 1930, musique de Rodolfo Sciammarella (interpret. Carlos Gardel / Guitarras)


  • " … J'ai senti le fil d'une peine / du côté du palpitant / Qui s'obstinait furtivement / à me taillader le cœur. /" ("… sentí el filo de una pena / que en el lado de la "zurda" / se empeñaba traicionera / por tajear mi corazón. /") : trois métaphores et la personnification du chagrin qui "s'obstinait …" communiquent l'atmosphère de cette petite tragédie ; et la métaphore lunfarde " del lado de la zurda ", traduite ici par " du côté du palpitant " mérite d'être expliquée à de nombreux lecteurs hispanophones. (D3C2)


  • " Car l'infortune / lui a joué un mauvais tour, / Son destin s'est retourné, / La vieillesse l'a démolie. /" ("La mala suerte / le jugó una carta brava, / se le dio vuelta la taba, / la vejez la derrotó. /") : deux métaphores de jeux de hasard pour résumer le destin de la mendiante. (D2C1)


Madame Ivonne - 1933, musique de Eduardo Pereyra (interpret. Carlos Gardel / Guitarras)


  • " Mademoiselle Yvonne était une petite / Qui dans le vieux quartier de la butte Montmartre, / Avec sa frimousse de joyeuse grisette, / Animait la fête au bal des Quat’z’arts." ("Mamuasel Ivonne era una pebeta / que en el barrio posta del viejo Montmart, / con su pinta brava de alegre griseta, / animó la fiesta de Les Quatre Arts. /" : pas de procédé rhétorique, mais la présentation d'un personnage dans un lieu lointain et mythique, et la référence à cette fête d'étudiants doit être expliquée à la plupart des lecteurs hispanophones. (D1C2)


  • "Alouette grise, / Ton chagrín me bouleverse / Ta peine est de neige / Madame Yvonne. / ("Alondra gris, / tu dolor me conmueve, / tu pena es de nieve… / Madam Ivonne. /" : souligner la comparaison de la femme avec une alouette et la signification du gris, l'émotion du narrateur, et proposer une interprétation de la belle métaphore de la "peine de neige". (D2C2)


Niebla del Riachuelo - 1937, musique de Juan Carlos Cobián (interpret. Goyeneche / Raúl Garello)


  • "Ombres qui s'allongent dans la nuit de la douleur; / Naufragés du monde qui ont vu sombrer leur coeur. /"("Sombras que se alargan en la noche del dolor; / náufragos del mundo que han perdido el corazón.../") : atmosphère dramatique avec deux puissantes métaphores: les ombres (des bateaux ?) s'allongent dans la nuit symbolique de la douleur ; les naufragés de la vie : au-delà des marins du thème ? (D3C2)


  • "Brume du Riachuelo ! / Amarré au souvenir / Moi je l'attends encore … / Brume du Riachuelo ! / De cet amour à jamais / Chaque jour tu m'éloignes … /" (¡Niebla del Riachuelo! / Amarrado al recuerdo / yo sigo esperando... / ¡Niebla del Riachuelo!... / De ese amor, para siempre, / me vas alejando… /") : personnification de la brume du Riachuelo dans la plainte émouvante du marin. (D2C1).


  • "Rêve marinier de ta vieille embarcation, / Bois ta nostalgie dans le silence du bistro./" ("Sueña, marinero, con tu viejo bergantín, / bebe tus nostalgias en el sordo cafetín, /") : une seule métaphore, en deux vers qui communiquent l'image d'un triste destin et d'une émotion. /" (D2C1)


  • "Triste caravane sans destin ni illusion, / Comme le bateau de la bouteille du bistro. / ("Triste caravana sin destino ni ilusión, / como un barco preso en la "botella del figón"... /") : transmet un sentiment de désespoir et d'enfermement avec la métaphore de la "bouteille du bistro", qui mérite en tant que telle d'être expliquée... (D2C2)

Garúa -1943, música de Aníbal Troilo (interpret. Goyeneche / Piazzolla)


  • Quelle nuit pleine d'ennui et de froid ! / Le vent apporte une étrange complainte. / La nuit ressemble à un puits de ténèbres / Et moi dans l'ombre je marche, me traîne ! /" (" ¡Qué noche llena de hastío y de frío! / El viento trae un extraño lamento. / ¡Parece un pozo de sombras la noche… / y yo en la sombra camino muy lento… / " : avec deux métaphores simples mais intenses ("complainte du vent", "puits de ténèbres") et un langage direct, il évoque un lieu, une atmosphère, et fait allusion au désespoir du protagoniste. (D3C1)


  • "Garúa ! Seul et triste sur ce ce pavé / Se traîne ce coeur traversé / Par une tristesse de masure. (/"¡Garúa! / Solo y triste por la acera / va este corazón transido / con tristeza de tapera. /") : L'audacieuse et réussie figure de style mérite d'être soulignée ; elle donne une idée de la douleur du narrateur. (D2C1)

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